Speaker, conseillère de vie, promotrice culturelle, experte en organisation d’évènements de haut niveau et grand public, spécialiste de la conception et de la mise en œuvre de stratégies de communication, directrice de l’agence KDA-PRO… Kayissan Dominique ATAYI KDA est une femme très résiliente et curieuse avec plusieurs casquettes qui cumule plus de 30 ans d’expériences professionnelles dont 24 d’entrepreneuriat. Redonner de la valeur à l’entrepreunariat et l’épanouissement des jeunes, c’est l’un des objectifs de cette dame qui écrit une singulière histoire de défis et de motivation à travers des initiatives très diversifiées telles que les ateliers de KDA et le programme de mentorat KDA. Avec Ekinamag, elle a partagé ses passions, ses initiatives et prodigué d’utiles conseils aux jeunes. Lisez plutôt son interview très dense et riche.
Une femme avec plusieurs casquettes, est-ce un atout d’être un touche à tout ?
Plusieurs casquettes oui, cela peut être un atout comme un défaut mais pour moi, c’est un vrai atout parce que je ne fais rien au hasard, je fais les choses en fonction des formations et des connaissances que j’ai. Par conséquent, c’est un atout de mettre à la disposition de qui le souhaite et de qui en a besoin mes connaissances. Il faut savoir ses compétences et pouvoir s’en servir. Cela peut être un défaut lorsqu’on s’improvise dans des fonctions dont on ne maîtrise pas les tenants et les aboutissants.
Le fait d’avoir étudié des langues comme le français, l’anglais, l’allemand entre autres, vous a-t-il prédestiné à embrasser un si large éventail de domaines ?
Il faut être curieux pour apprendre une langue qui n’est pas la vôtre car à la base le français n’est pas notre langue. L’école a fait que nous avons appris le français. Aller au-delà pour apprendre d’autres langues une fois à l’université est une preuve de curiosité. Une curiosité qui m’a poussée à apprendre plusieurs métiers pour connaître un peu de tout et je vous assure aujourd’hui à 55 ans je suis prête à apprendre encore pleines d’autres choses.
Plus de 30 ans d’expériences professionnelles dont 24 d’entreprenariat, tout s’est passé comme sur des roulettes ou vous avez des souvenirs difficiles.
C’est vrai qu’il y a eu beaucoup d’expériences qui m’ont marquées négativement mais elles m’ont permis d’être plus forte et de développer ma résilience. Je dirai donc que ce sont des expériences formatrices plutôt que des expériences qui m’ont fendu le cœur parce qu’il faut savoir que tout ce qu’on vit est fait pour nous permettre d’apprendre quelque chose et donc on ne peut pas penser que tout sera rose sur le chemin. Il y a des expériences qui ont été très pénibles mais aujourd’hui je suis là encore plus forte que jamais.
Parlez-nous brièvement de vos différentes initiatives
Je vais parler des plus récentes .Il y a eu l’initiative NANAGAN, les ateliers de KDA et le programme de mentorat de KDA. Alors NANAGAN, c’est spécifiquement adressé aux femmes et à une classe particulière, les femmes rondes. Mais à travers ces femmes rondes, les femmes qui se sentent complexées peuvent se retrouver dedans.
Les ateliers de KDA sont des ateliers ouverts à tout public, orientés vers les jeunes récemment.
En ce qui concerne le programme de mentorat, c’est un programme de 6mois destiné à une cible sélectionnée. Voilà les programmes que nous avons mis sur pieds durant ces quatre dernières années.
Vous avez en effet initié NANAGAN pour valoriser la femme africaine, la femme ronde. Pourquoi une telle initiative ?
Vous l’avez si bien dit que c’est pour valoriser la femme africaine. Beaucoup ont compris à tort que c’était une incitation à l’obésité. Absolument pas, c’est plutôt une incitation à l’acceptation de sa morphologie. C’est pour montrer à des femmes qui ont des complexes physiques et des femmes qui ont une faible estime d’elles-mêmes, qu’il y a beaucoup d’autres valeurs qu’il faut développer pour masquer tant soit peu ces imperfections qu’elles ressentent. Donc l’objectif est d’aider ces femmes à se développer, à savoir qu’en dehors de l’aspect physique, il y a d’autres qualités qu’elles ont à l’intérieur notamment l’intelligence, la compréhension, la bienfaisance, les capacités techniques etc. On essaye à travers des formations et des coachings de montrer à ces femmes à s’accepter telles qu’elles sont et à développer d’autres aspects qui vont leur permettre de faire face à ce challenge d’être acceptée parce que de toutes les façons qu’on soit grosse ou qu’on soit mince ou élancée, ce qui est important, c’est ce qu’on va véhiculer comme activités.
D’ailleurs, on parle on parle de concours d’élégance et non de beauté parce que la beauté est éphémère et se fane au fil du temps or ce qu’on a à l’intérieur reste et c’est ce qu’on laisse.
Les ateliers de KDA, de quoi s’agit-il exactement ?
C’est un espace intergénérationnel de formations, d’échanges et de discussions. C’est un espace créé qui permet à des personnes qui veulent apprendre sur des sujets que nous mettons à disposition de tous et gratuitement. C’est pour leur permettre non seulement de rencontrer des speakers que nous allons choisir qui sont des personnes qui veulent bien nous accompagner à travers le partage de leurs connaissances, de leur plus-value à mettre à disposition de celui qui vient à ces formations .Il s’agit de partager les connaissances de manière gratuite pour tous.
Les ateliers de KDA ont commencé en Octobre 2020 en pleine crise de covid avec des effectifs moins considérables qui se sont accrus avec la levée des restrictions. Depuis l’année passée, nous avons opté pour un format national, c’est-à-dire nous avons décidé d’aller à la rencontre des jeunes à l’intérieur du pays parce qu’il y a beaucoup d’activités de formations qui sont initiées à Lomé mais à l’intérieur du pays, il y en a peu. Donc nous avons voulu vraiment monter sur ce cheval, aller vers l’intérieur ce qui ne veut pas dire que Lomé est exclue des activités.
Des exemples de sujets que vous développez souvent lors de ces ateliers
Nous avons eu à développer aussi bien des thèmes généraux que des thèmes assez particuliers comme la jalousie, l’infidélité, la résilience. Il y a eu des thèmes comme comment développer son potentiel en temps d’adversité, comment devenir une personne impactante, comment réussir en étant chez soi pour développer son propre eldorado et plein d’autres thèmes et chaque personne repart avec quelque chose.
Parlez-nous également mieux de votre programme de mentorat
C’est un programme initié à la suite de notre première tournée nationale. Nous avons constaté que les jeunes avaient besoin d’être accompagnés mais pas en groupe mais de manière plus personnelle. Malheureusement avec des moyens limités, nous n’avons pu prendre que 10 personnes parce qu’il faut être proche de ces jeunes, avoir le temps de leur parler quand ils en ont besoin, de les guider, de les accompagner mais aussi de les former, de les suivre dans un programme de développement personnel et de leur faire profiter de certaines personnes ressources que nous avons à disposition qui vont parler aussi de leurs expériences.
Ce programme a une durée de 6 mois. Alors il s’agit de la première cohorte. Le lancement a été fait le 15 Avril 2023. Les bénéficiaires auront droit à de différentes formations. On a déjà commencé avec la confiance et l’estime de soi, il y aura le conseil en image, le branding, la force de l’engagement, la bienveillance, l’altruisme et il y aura des visites d’entreprises, des visites d’institutions et une rencontre avec un artiste de référence de la place qui va lui aussi leur prodiguer des conseils. Est programmée également, la visite d’un site touristique. C’est un programme qui va permettre à ces jeunes de toucher du doigt un peu de tout et bien sûr il y aura des rencontres bilatérales entre eux et moi pour échanger sur leurs problèmes, les thématiques personnelles qu’ils veulent développer et je verrai dans quelle mesure les accompagner du mieux que je peux.
Comment a été fait le choix des bénéficiaires pour ce programme ?
Nous avons lancé un appel à candidature en décembre 2022 et nous avons clôturé le dépôt fin janvier. A l’issue de l’appel, nous avons eu 20 dossiers qui répondaient aux critères demandés et nous en avons retenu 10 après interview sur la base des objectifs exprimés pour bénéficier du programme. Je pense que c’est une très belle promotion qui va sortir.
Vous avez organisé des évènements pour des institutions et structures de renoms. Le satisfecit était-il à la hauteur pour vous et pour vos clients ?
Je remercie le Seigneur d’avoir mis à mes côtés une équipe très disponible, très volontaire et très compétente. C’est grâce à cette équipe et son savoir-faire que nous avons pu nous mettre ensemble, que nous avons pu travailler avec des institutions de renommée nationale ici au Togo. Et je dirai que la plupart de nos évènements à l’exception d’un seul, ont connu un écho favorable. Il y a eu des évènements particulièrement marquants comme le premier concert de l’artiste King Mensanh au stade de Kégué que mon agence avait organisé. C’était un véritable travail d’équipe. Il y a eu aussi l’organisation des forums internationaux et d’autres évènements qui sont de belles réussites.
Comment arrivez-vous à vous en sortir en saison morte’’ ?
Je vais peut-être vous surprendre. Pour moi, il n’y a pas de saison morte, il y a des hautes saisons et des basses saisons et donc nous arrivons à gérer en basse comme en haute saison parce que celui qui va dire qu’il n’y a rien à faire, c’est qu’il n’a pas cherché complètement. C’est vrai qu’il peut ne pas y avoir une activité génératrice de gros revenus mais il y a toujours quelque chose à faire. La dernière fois, je partageais avec quelqu’un que j’ai envie de développer une activité qui va permettre à tout un chacun de pouvoir trouver ne serait-ce que le minimum pour assurer le pain quotidien. Nous devons développer de petites activités agricoles. Et de plus en plus, nous devons retourner à la terre. La terre nous a prise, nous a porté, nous a nourri et nous retournerons à elle. Que pouvons-nous donc faire avec la terre pour permettre à chacun de trouver sa pâte chaque jour ? Et personnellement, j’y pense énormément. Vous savez, le Togo est une terre riche, un pays de grandes opportunités, nous devons arrêter de nous plaindre et prendre notre courage à deux mains. Moi j’ai cessé de me plaindre, je me dis, quand ça ne va pas que c’est un moment de basse saison, la haute saison viendra. Et pendant cette basse saison, je cherche quoi faire pour ne pas tomber en saison morte et je ne tombe jamais en saison morte.
La crise sanitaire a-t-elle eu un impact sur vos activités ?
Effectivement, la crise sanitaire a entraîné une pause dans nos activités. Économiquement, cela a été difficile, on est resté plusieurs mois sinon plusieurs années sans travailler. La chance que personnellement j’avais est que j’avais réussi à développer un réseau à l’international, ce qui m’a permis de continuer à faire quelques petites activités par le biais du web. Cela m’a permis de tenir mais c’était très compliqué. COVID a laissé des impacts et on en n’est pas encore sorti de COVID, il y a cette crise russo-ukrainienne qui surgit avec ses conséquences. Tout cela nous apprend à développer notre résilience. La résilience de croire que tout ira mieux, que quel que soit la situation, on s’en sortira. Toute la force et tout le secret, c’est la résilience, il faut y croire jusqu’au bout. Au fil des années les personnes avec qui je travaille ont su développer cette résilience et donc ça fait que nous arrivons à tenir et surtout qu’on ne s’est pas arrêté à ce que nous savions faire. Quelqu’un disait que lorsque nous sortirons de COVID et qu’on reste encore au même stade qu’on était avant, c’est qu’on n’a rien compris. Et nous avons très tôt compris qu’il faut faire quelque chose d’autre que ce que nous avons l’habitude de faire. C’est pourquoi nous avons initié de nouveaux programmes qui nous permettent aussi de nous rendre utiles et de pouvoir développer nous-mêmes nos propres capacités.
Conseillère de vie, qu’avez-vous à dire aux jeunes filles et aux jeunes femmes ?
Alors déjà la jeune femme en Afrique nous sommes des entrepreneures, on dit que l’Afrique est le continent des championnes, nous sommes des championnes. Il y a 24% des femmes en Afrique qui sont des entrepreneures contre 6% en France. Nos mères depuis les temps immémoriaux ont toutes été des battantes. Ce sont les femmes qui soutenaient les familles. Aujourd’hui les jeunes filles pensent que tout doit arriver rapidement et tombent dans des pièges inimaginables, on rentre dans beaucoup de choses négatives. Je pense qu’il faut qu’elles apprennent à se battre, à retrousser les manches. Tout récemment je discutais avec une jeune femme qui a une maison et une devanture et je lui disais pourquoi elle n’ouvrirait pas une petite cafétéria juste avec une table, deux poêles et quelques ustensiles et elle peut se faire de l’argent en devenant la meilleure vendeuse de pain à omelette du quartier. Mais elle m’a répondu qu’elle ne peut pas faire ça, les gens vont se moquer d’elle. Vous voyez ? Il faut que les jeunes filles apprennent à commencer tout petit pour aller plus grand. C’est le gros conseil à donner.
Comment vous définissez vous ?
Je dirai que je suis une personne qui a beaucoup à partager. Une personne que très peu de choses effraient. Et la plus grande chose que je crains est de ne pas pouvoir faire ce pour quoi je suis venue sur terre. C’est pourquoi je me dis, ce que je peux partager gratuitement avec les autres je n’hésite pas.
Je me définis comme une personne résiliente parce que j’ai connu la mort sous tous ses aspects, j’ai traversé beaucoup d’épreuves mais à chaque fois je me suis relevée.
Je suis une personne en mission car j’ai quelque chose à transmettre. Je me définis aussi comme une personne très spirituelle, pas religieuse mais spirituelle et cette spiritualité m’a beaucoup aidée.
Votre mot de fin…
J’en appelle aux jeunes à être plus innovants. Dès que quelqu’un fait quelque chose, on va mal la piquer, mal la reproduire. Il faut vraiment qu’on arrête ça au Togo. Il faut apprendre à être bienfaisant également auprès de toutes les personnes, mais surtout des parents s’ils sont encore vivants parce que la gratitude et la bienfaisance c’est quelque chose qui peut vous pousser plus loin que vous ne le pensez.
Et il y a des attitudes que les jeunes ont de nos jours, qu’ils doivent changer s’ils veulent aller loin, c’est de penser que tout peut se gagner aussi facilement. Au lieu de vous attacher au matériel, attachez-vous aux valeurs car le matériel est bon mais les valeurs, c’est mieux. Sachez également qu’on peut vous donner des conseils mais à vous de les mettre en maturation et vous en êtes pleinement responsable et vous en assumerez les conséquences. Interview réalisée par Ida Badjo