Elle a su dépasser les limites de la réserve, de la perception des autres pour s’accepter et se construire et elle décide d’aider les autres filles et femmes qui sont dans la situation de handicap comme elle, à s’épanouir. Françoise DOGOMANGUE est sans doute une référence pour qui la résilience est l’autre nom de la réussite. EkinaMag a eu l’immense plaisir d’interviewer la présidente de l’Association des Femmes et Filles Handicapées Vaillantes de la Région des Savanes (A2FHV-S), organisation basée à Dapaong.
Chaque 3 Décembre est célébrée la journée internationale des personnes handicapées.
Qui est Françoise DOGOMANGUE?
Je suis une jeune femme togolaise, originaire de la région des Savanes précisément de la ville de Dapaong. Je suis enseignante de profession et jeune femme leader. Je suis la présidente de l’Association des Femmes et Filles Handicapées Vaillantes de la Région des Savanes (A2FHV-S) ; étant moi-même une personne handicapée physique. Vouant une grande passion pour la musique, je valorise à travers mes compositions les bonnes pratiques visant à sensibiliser la société.
Parlez-nous un peu de votre parcours académique !
J’ai fait obtenu le BAC II, série littéraire en 2005. Après mon baccalauréat, j’ai continué mes études en m’inscrivant dans un centre de formation professionnelle, en Secrétariat comptabilité où j’obtiens un diplôme en gestion informatique, étant la première de ma promotion.
Parlez-nous de l’Association des Femmes et Filles Handicapées Vaillantes de la région des Savanes (A2FHV-S) dont vous êtes présidente
Depuis mon jeune âge, j’ai eu à traverser beaucoup de situations qui n’étaient pas idéales pour me permettre d’être une femme épanouie. Mais j’ai su développer une capacité à accepter ma situation de handicap, à persévérer dans la vie malgré les obstacles, à m’exprimer et à imposer mes idées, surtout quand l’occasion se présente à moi.
Contrairement à moi, certaines de mes sœurs n’arrivent vraiment pas à accepter leur situation de handicap. Du coup leur insertion dans la société est très difficile. L’influence négative de la société les rend moins autonomes, moins épanouies.
Une situation qui me révolte et je me suis dit qu’il fallait que quelqu’un se lève pour leur dire que malgré notre situation de handicap, nous sommes aussi capables de contribuer valablement à notre propre épanouissement et au développement de nos communautés. Voilà un peu ce qui m’a poussé à créer cette association. Nous faisons des sensibilisations partout où l’occasion nous est donnée. Nous éduquons non seulement les femmes et les filles handicapées mais aussi les personnes dites ‘’valides’’, sinon la population de façon générale.
Notre défi est que toutes les femmes et les filles handicapées soient vraiment épanouies, autonomes, que leurs droits soient vraiment respectés.
Comment les femmes en situation de handicap sont-elles impactées par les violences basées sur le genre?
La femme handicapée est doublement vulnérable. Ce n’est pas du tout facile pour elles .Elles vivent des frustrations au quotidien, notamment dans leurs familles, dans les foyers où on ne les accepte pas. C’est d’ailleurs rarement que vous allez voir une femme handicapée au foyer. Les violences basées sur le genre sont donc plus remarquables au niveau des femmes et des filles handicapées.
En 2018, vous avez été nominée « jeune femme leader ». C’était dans quel cadre ?
C’était dans le cadre du projet Pro-CEMA (Programme de Consolidation de l’État et du Monde Associatif). Sur toute l’étendue du territoire, j’étais la seule femme handicapée qui a eu la chance de recevoir ce titre honorifique des mains de la Ministre de la Promotion de la Femme d’alors. Cette distinction a suscité en moi, la persévérance, l’envie de toujours me battre parce que je me suis rendu compte que j’avais du potentiel. Je ne m’arrête pas, je continue de me battre autant que je peux.
Parlez-nous de votre passion pour la musique
J’ai eu le déclic quand je suis rentrée au Collège. Je chantais à la chorale, j’animais chaque temps au camp des scouts puisque j’en étais une d’ailleurs. Il faut dire que c’est avec le scoutisme que j’ai découvert que j’avais un réel talent pour le chant, alors je me suis approchée de certains groupes de musique dans le temps à Kara, j’ai même appris à jouer de la guitare.
Aujourd’hui, je valorise dans mes compositions les bonnes pratiques dans la société, je valorise la femme, j’encourage les femmes et les filles handicapées, les parents des personnes handicapées.
Comment avez-vous fait pour surmonter les barrières et devenir la femme épanouie que vous êtes aujourd’hui ?
Personnellement je suis de nature très courageuse et j’ai un mental fort. Toujours souriante, je me suis acceptée, j’aime ma propre personnalité, je suis très fière de la personne que je suis. J’ai confiance en mes propres capacités et potentialité. Tous ces atouts m’ont permis de surmonter beaucoup de difficultés. Aujourd’hui, je suis une femme accomplie, mon handicap ne saurait être un obstacle, puisque je sais à présent que je dois contribuer au développement de mon pays, il me suffirait juste d’avoir les moyens de réaliser mes ambitions.
À quoi ressemble votre quotidien de personne en mobilité réduite, hyper occupée ?
Je cours beaucoup et j’apprends à mes enfants à courir mieux que moi. Je leur dis que l’avenir appartient à celui qui se réveille tôt et qui arrive à temps à destination. Je m’organise beaucoup, vu que je n’ai pas assez de temps. Je sais aussi me reposer et passer du temps avec mes enfants quand je suis un peu libre.
Si vous avez un message à délivrer à la société, ce sera lequel ?
Je voudrais à travers ce canal dire à la société d’accepter tout le monde sans distinction, d’arrêter de juger les personnes handicapées car nous sommes tous des humains et nous avons chacun de nous notre contribution à apporter pour un développement harmonieux.
Un mot aux jeunes filles qui vous lisent
Sachez tout simplement que tout est possible, il suffit de mettre un peu de volonté, de persévérance dans le travail bien exécuté. Décidez d’être meilleure et vous le serez.
Merci à EkinaMag
Propos Recueillis par Hélène DOUBIDJI